Entrevue :Francis Pépin

Entrevue :

Francis Pépin, Directeur ressources humaines chez Roche Diagnostics. Éducation physique et ressources humaines… un profil RH atypique qui s'avère plein de bon sens pour Francis Pépin. Parlez-moi un peu de vous, de votre parcours professionnel ? Je suis bachelier en éducation physique, je n’ai pas un cheminement RH typique. J’ai commencé dans une compagnie de bureautique comme représentant sur la route durant près de 4 ans. Ensuite je suis allé dans le domaine de la santé , comme représentant dans le secteur de la santé pour une compagnie de diagnostic. Par la suite, j’ai voulu appliquer ce que j’avais appris à l’école, je voulais enseigner, gérer. Rapidement, je suis allé du côté training, formation de force de ventes, coaching de cadres intermédiaires et superviseurs. Il y a 7 ans maintenant quelqu’un ici est venu me chercher et m’a demandé de partir le département de formation pour son unité d’affaires. J’ai fait cela pendant deux ans et quand je suis rentré chez Roche j’ai tellement aimé la compagnie que j’ai décidé d’y développer ma carrière au niveau RH, je voulais parvenir à gérer l’équipe des ressources humaines de Roche Diagnostics. Ce que je fais depuis peu. J’ai fait également du développement organisationnel aussi entre ça . Qu’est-ce qui vous a attiré dans les ressources humaines ? Cela ne va pas contre la profession, mais pour moi les ressources humaines n’ont pas la place qu’il leur revient étant donné l’orientation stratégique des entreprises. Ma mission par rapport aux RH c’est que l’on puisse être reconnu comme un joueur équitable, qui apporte des éléments essentiels dans la réussite de l’entreprise au niveau des affaires. C’est peut-être très idéaliste j’en conviens mais c’est ce que je me suis donné comme mandat chez Roche Diagnostics. C’est ce qui fait qu’une entreprise réussit ou ne réussit pas dans mon livre à moi. Beaucoup de chemin a été parcouru depuis mon arrivée chez Roche, le moment était approprié pour que cela se passe. On a instauré un système de gestion de la performance assez fantastique, c’est un gros changement culturel, un bon niveau de résistance, mais on a fini par passer au travers et ça commence à faire ses preuves. On est impliqué de plus en plus au niveau des unités d’affaires, à tous les problèmes organisationnels, structurels, de développement, on commence – en bon français- à « en mener plus large ». Quelle est l’influence de votre expérience en vente marketing sur votre façon de faire de la GRH aujourd’hui ? Je me rappelle avoir été dans un groupe de discussion un moment donné et c’était tous des gens qui avaient beaucoup d’expérience et j’entendais tous ces gens dire « on veut devenir un partenaire stratégique ». Je me souviens leur avoir répondu « il vous manque simplement une chose, c’est d’aller le vendre, de mettre du marketing autour de ça, de vous exposer, de le supporter avec ce que vous avez à offrir. Certaines personnes ont bien compris ce que j’essayais de faire passer comme message, les puristes ont trouvé cela un petit peu plus difficile. Mes antécédents de vente m’amènent lorsque j’instaure un programme ou quand je fais quelque chose chez Roche, à ne pas faire juste le programme, mais à travailler également les communications, le branding de l’image que l’on veut projeter comme groupe. Quelle est votre vision du rôle RH dans votre entreprise ? C’est selon moi à deux niveaux. L’aspect administratif, on ne peut y échapper. Le deuxième rôle que l’on aimerait jouer naturellement est un rôle plus stratégique. Par exemple en terme de « staffing ». On veut développer les stratégies à cet égard là parce que dans notre créneau nous ressentons déjà très fortement la pénurie de main d’œuvre. Nous sommes à nous doter d’une ressource pour développer les stratégies en « sourcing ». Tout ce que l’on dépense à ce niveau-là on veut que ce soit une personne à l’interne qui puisse être plus proche des besoins pour aller sur le marché chercher les expertises dont nous avons besoin. On veut sortir de nos frontières à cet égard là parce que déjà ici au Québec et au Canada c’est de plus en plus difficile d’aller chercher les bonnes personnes. Quelle est votre stratégie pour devenir un employeur de choix ? Employeur de choix , je ne suis pas prêt à nous exposer comme un employeur de choix à l’heure actuelle. Il y a plusieurs définitions pour employeur de choix selon à qui on s’adresse. Pour moi, employeur de choix c’est fournir un cadre de travail, un environnement de travail qui est propice à la performance. Pour moi c’est cela être employeur de choix. Il y en a qui vont dire que cela prend un gymnase ou des choses comme cela. On est pas encore dans cette ligue mais je dirais que si c’est cela que ca prend en bout de ligne, peut être qu’on l’aura un jour. Pour le moment c’est beaucoup plus au niveau structurel, au niveau organisationel, avoir un environnement propice à la performance. Lorsque je regarde à l’interne ma population chez Roche, je veux qu’il y ait un sentiment, une identification par rapport à la compagnie. Je veux qu’ils soient bien. Bien traité, avec de bonnes relations de travail. Tout cela influence éventuellement l’externe. Mais le focus aujourd’hui n’est pas à l’externe, il est à l’interne Que recherchez-vous chez vos employés ? Je pense que l’on a été reconnu pour avoir des gens qui étaient bien dans l’action, qui faisaient arriver les choses, un esprit intrapreneurial, des gens qui sont en mesure de développer leur segment d’affaire comme si c’était le leur mais dans une entité qui s’appelle Roche. Autonomie, responsabilisation. La passion aussi, ce sont des choses que l’on recherche chez nos individus pour qu’ils puissent mener à bien leurs projets. Quels sont les défis de l’équipe ROCHE RH pour 2005 ? Nous avons restructuré le département RH cette année pour offrir sept segments de services, Gestion de la Compétence et performance qui relève du développement organisationel, rémunération et avantages sociaux, dotation, structure organisationnelle, gestion de l’information, relation avec les employés et enfin santé et sécurité. Le défi est de mettre ces grands thèmes en perspective de plans bien définis que l’on veut mettre de l’avant l’année prochaine. Notre planification 2005 s’amorce, on termine 2004. En 2004 on a levé toutes les roches sous lesquelles nous étions responsables au niveau opérations et on s’est assuré que les processus étaient bien en place et fonctionnels. Pour 2005 on aspire à devenir un partenaire plus stratégique. On ne pouvait pas penser devenir partenaire stratégique si les opérations faisaient défaut et c’est là-dessus que l’on travaille. On est donc très concentré au niveau process à l’heure actuelle, s’assurer qu’il y a de la valeur ajoutée dans tout ce que l’on fait. Quelle est votre définition d’un bon recruteur ? Un bon recruteur c’est pour moi quelqu’un qui a une habilité à comprendre le contexte dans lequel le poste s’inscrit. De comprendre au-delà du poste, l’environnement de travail, les relations, la chimie potentielle de groupe et d’être capable d’aller au-delà d’une description de poste. On a une description de poste qui décrit ce que cela prend au niveau fonctionnel etc etc… il faut que le recruteur l’interprète, qu’il soit en mesure d’aller chercher les détails nécessaires pour définir le profil type que je recherche. J’aime que le recruteur « drive » ce processus là. Je n’ai pas des gestionnaires qui sont tous habilités à définir ce que cela prend comme individu donc j’apprécie lorsque les recruteurs sont en mesure d’apporter cette habilité de compréhension à un contexte donné. Quelles sont les enjeux des recruteurs d’aujourd’hui par rapport à il y a 10 ans ? L’emploi comme tel se glorifie dans la mesure où aujourd’hui ils deviennent des joueurs de plus en plus clés au niveau de l’entreprise pour la raison suivante : pénurie de main-d’œuvre. On en a déjà parlé. Il y a deux écoles de pensée. Certains pensent que c’est surgonflé. Moi je peux vous garantir que dans notre secteur technologique c’est un problème. Donc les habilités de ces gens la ont dû augmenter. Les bons recruteurs, j’ai énormément de respect pour eux, ce sont des gens qui sont très importants. Ils font affaires avec une clientèle plus rare, beaucoup plus indépendante, beaucoup plus demandante relativement à leur changement de carrière. Les gens sont plus difficiles à faire bouger. Le recruteur a une job de vente à faire alors qu’auparavant lorsqu’il y avait plus d’emplois, ils géraient simplement des CV. Aujourd’hui le bon recruteur est capable de cibler les bonnes personnes mais il a aussi une job de représentation à faire et il faut qu’il soit convaincu que la compagnie qu’il représente c’est LA bonne compagnie pour cet individu là. Si on les qualifiaient de parent pauvre des ressources humaines autrefois, je les qualifierais plutôt aujourd’hui de partenaires. Quels sont les impacts de l’utilisation des systèmes Rh sur la gestion des Rh dans votre organisation ? On a un créneau qui s’appelle information organisationelle, c’est encore en développement, mais on a mis en place ce que l’on appelle les HR dashboard, ou des metrics, c’est indispensable maintenant. Toute notre planification à court et moyen et long terme est basée entre autres sur les ressources, sur ce que dont on aura besoin. Nos systèmes nous fournissent cette information pour que l’on puisse prendre des décisions. Il n’y a qu’à penser au plan de succession. On a besoin du système pour qu’il nous fournisse l’historique de la performance des individus, le positionnement, quel type de compétences est défaillante, quelle type de compétences est forte chez Roche etc, etc… La problématique c’est de faire en sorte que les différents systèmes d’informations se parlent entre eux. On n'est pas encore rendu avec un système unique en mesure de fournir la totalité de l’information. PENSER, INNOVER, CHANGER (THINK, INNOVATIVE AND CHANGE) sont les valeurs véhiculées par ROCHE, comment les appliquez-vous dans votre plan RH ? On rentre dans le cœur de ce que l’on a fait cette année. Notre restructuration du département ressources humaines passait par là. Notre département avait besoin d’un nouveau souffle,on avait besoin de répondre mieux au besoin de l’organisation. On a donc resegmenté notre offre de service. On avait un nombre limité de ressources qui faisait un petit peu de tout. Nous avons fait un sondage auprès des employés, « parlez-nous de vos ressources humaines, de ce que vous en pensez », ils nous ont guidé dans leur vision d’un département de ressources humaines idéal, et de cela en est ressorti deux nouvelles positions que l’on a créés pour servir l’organisation, une nouvelle segmentation, une nouvelle méthodologie de travail… Pensez-vous que nous allons vers une individualisation toujours croissante de la GRH ? La GRH va-t-elle connaître le même développement que le marketing : une orientation one to one ? Les gens sont aujourd’hui plus éduqués, plus informés et ont plus de choix. Ils demandent cela comme consommateurs. Si l’on considère nos employés comme des consommateurs de services, on n'a pas le choix de s’adapter, et puis oui, il y a un certain niveau de personnalisation qui a à être fait. Ce qu’il y a de difficile pour répondre à cela, c’est que la plupart du temps, c’est un manque de ressources qui ne nous permet pas d’aller aussi loin que l’on voudrait. Il y a tout de même des choses qui se font pour reconnaître l’état du marché actuel comme des horaires flexibles, ce sont des choses que l’on n'a plus vraiment le choix de donner. Le télétravail également est une chose qui est déjà amorcée et que l’on met de l’avant. L’aspect flexibilité sans être du « one to one » est un premier pas dans ce sens. Quelle est votre définition de la loyauté chez vos employés ? La loyauté vient dans le partage équitable entre l’employeur et l’employé. Si l’employé en donne et sent que l’employeur met la même partie, c’est cela qui engage les employés. Tout ce que je peux dire c’est que je sens chez Roche Diagnostic la loyauté très forte au niveau des employés, on a un taux de roulement très bas et ça se sent dans le type de personne que l’on engage. On parlait de passion tout à l’heure, pour moi, la loyauté est mesurée dans ce qui se dégage au niveau de la passion des employés pour ce qu’ils font. Que désiriez-vous faire lorsque vous étiez enfant ? J’ai toujours voulu avoir un impact chez les gens… Quand j’étais en cinquième année, mon professeur d’éducation physique a dit à ma mère « lui il va faire un professeur d’éducation physique ». C’est resté et je ne me suis jamais posé de questions. Par contre lorsque j’ai fait mon bac en éducation, j’ai toujours coaché, j’ai toujours eu des activités avec des objectifs et l’on arrivait en équipe à quelque chose. De façon très large, je voulais être en mesure de dire des choses, de poser des gestes qui avaient un impact chez les gens. Aujourd’hui, lorsque les gens regarde mon cheminement… un bac en éducation , rendu aux ressources humaines, ils ont parfois du mal à faire le parallèle… pour moi c’était décidé que j’occuperais un poste comme cela. Je suis dans le milieu de la santé, je suis dans un rôle ou je peux avoir un impact au niveau des gens de l’organisation. Dans un rôle aussi où je peux avoir un impact au-delà de l’organisation, lorsque je disais que l’on avait à vendre la profession, à positionner les ressources humaines comme partenaire stratégique. J’ai pas mal tout ce que je voulais quand j’étais petit.

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