L’uniforme corporatif

Nous vivons dans un monde d’apparences et nous sommes ce que nous projetons ou ce que nous souhaitons projeter. Le style vestimentaire, la voiture, le vélo ou le métro, la résidence font partie de ce que nous envoyons comme message aux autres sur QUI nous sommes. Que vous vous changiez en « gougounes » et pyjama en rentrant du bureau ne regarde que vous et votre famille. Nombreux d’ailleurs sont ceux qui préservent leur intimité et limitent leurs apparitions en vieux survêtement élimé à leur petit (très petit) cercle fermé.

ScreenHunter_320-Jun-25-12-45.jpgUne fois la porte de la maison passée en direction du bureau, il n’y a plus un cheveu qui dépasse (en surface à tout le moins) et même si vous portez le style décontracté au travail, il y a de nos jours une hiérarchie et un savoir-faire hautement subtil dans la façon de se vêtir. Le bon vieux jean unique est remplacé par le denim version bureau le vendredi, soirée cocktail, ambiance business techno, etc. Bref, le langage vestimentaire aujourd’hui est savamment plus complexe et les règles et les codes ont changé. Il y a 20 ans, les femmes du centre-ville portaient le tailleur-jupe bleu marine avec des collants (été à 45 degrés comme en hiver) avec un chemisier blanc dont le col dépassait sur le veston. Selon les pays, on pouvait y retrouver une variante du serre-tête de velours noir ou foulard gentiment noué autour des épaules. Les entreprises à travers le style vestimentaire de leurs employés révèlent leur culture et leur personnalité. Il y a quelques années, je pouvais d’ailleurs deviner dans quel cabinet de services professionnels travaillaient les candidats qui se présentaient en entrevue à mes bureaux rien qu’à leur costume, leur coupe de cheveux et la posture dans la salle d’attente. L’esprit de l’entreprise transcende l’individu. On choisit de travailler ou de recruter des personnes qui semblent véhiculer les mêmes valeurs. L’apparence, les accessoires et le style de vie en font autant partie que vos idées et vos convictions. Bref, difficile de prêcher pour la simplicité volontaire lorsque l’on roule en VUS ou l’inverse.


Néanmoins, aujourd’hui, on peut être ingénieur, avocat ou comptable dans un grand cabinet et arborer le « look » métro-sexuel ou encore le style ultra-féminin digne des séries « Suits » ou « Sex and the City ». Mais il n’en reste pas moins que l’on ne s’habille pas de la même façon selon la ville où l’on travaille, selon l’industrie, l’entreprise et sa fonction. Les employés revêtent un uniforme corporatif pour mieux s’intégrer. On le voit souvent avec les nouvelles recrues qui, après quelques semaines ou mois, ont changé leur style. Ce qui est plus délicat c’est qu’il faut savoir rapidement décrypter ce fameux uniforme corporatif pour l’adopter. Autant vous serez averti rapidement sur le style de leadership, de gestion, d’attitude et de comportement qui caractérisent votre organisation, autant votre patron ou vos collègues seront plus réservés à vous faire remarquer que vous devriez envisager de relooker votre garde-robe…


Est-on plus crédible si on s’habille en Prada? Pas si sûr… Sauf peut-être si vous travaillez chez Vogue ou dans le milieu de la mode haut de gamme. Récemment, Sheryl Sandberg, la COO de Facebook, se faisait critiquer pour ses tailleurs Gucci et sa collection de sacs à main de grandes marques. Je me souviens aussi très bien qu’un de mes clients un jour m’avait dit qu’il ne recruterait pas la candidate qui avait pourtant le meilleur profil, car elle s’était présentée à l’entrevue finale avec son sac Vuitton. Cela l’avait choqué. Dans un autre dossier, le CEO d’une entreprise pour qui je venais de recruter son chef de la Direction financière m’appelle un matin pour me dire que le candidat recruté s’était pointé le premier jour en Porsche au bureau. Faute de goût ou de jugement? Les grands cabinets d’avocats, comptables ou autres savent bien que la décoration du bureau donne le ton sur leurs honoraires. Plus l’adresse est prestigieuse, plus la décoration est somptueuse, plus la note sera salée. Certains clients apprécient, d’autres moins. Les signes extérieurs de richesse ne sont pas toujours les bienvenus. Un président qui arriverait en Bentley au bureau pourrait accroître le sentiment chez ses employés de se faire exploiter alors que, dans un autre contexte, cela pourrait au contraire les stimuler à se dépasser. Tout est une question de perception et d’industrie. Quand on arrive dans des écarts de rémunération trop importants avec l’employé de base, les tensions émergent. S’il était acceptable pour un patron de gagner 20 fois le salaire du plus bas salarié il y a 50 ans, on constate qu’en 2013 certains patrons gagnent jusqu’à 300 fois le salaire des employés. Si tous les employés ne lisent pas le rapport annuel en détail, ils savent observer ou lire les journaux et magazines « people ». Vos cadres et la haute direction doivent donc y être attentifs. De plus, quand les médias sociaux se mettent de la partie, il faut être d’autant plus vigilant et avoir une certaine retenue quant à l’image que vous diffusez, surtout si vous êtes dans les affaires (par rapport à l’industrie du show-biz ou de la mode…).


Toute entreprise a ses propres codes écrits et non écrits, à vous de les décoder et savoir vous adapter sans y perdre votre personnalité.

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