Un candidat et son pêché

C’est l’histoire (vraie) d’un candidat et d’une erreur de jeunesse. Jean (nom fictif) avait 16 ans un jour de grand ennui en fin de session. Il décida, avec sa gang de chums, de flâner dans les rues plus ou moins désertes d’une petite ville du Bas-Saint-Laurent (qui aurait pu aussi être Montréal, l’Estrie ou la Beauce, on s’entend!). L’esprit de troupeau ou le fameux « groupthink », hormones mâles de l’adolescence en mode panique, amène la joyeuse troupe à agresser une pauvre cabine téléphonique esseulée et de lui faire sa peau ou plus simplement de la détrousser sur-le-champ.
 
Évidemment, le crime une fois commis, la bande est moins joyeuse lorsque la police intercepte les deux protagonistes qui semblent être les leaders du groupe (les autres se sont échappés et ne seront jamais rattrapés ni dénoncés d’ailleurs! On peut être un jeune criminel et avoir le sens de l’honneur tout de même…). Bref, Jean se retrouve inculpé au criminel. Comme il n’a que 16 ans, son cas est vite réglé et le tout passe aux oubliettes après un été passé « au vert », en clair, à la campagne sans aucun contact extérieur et une inscription à la rentrée suivante dans un chic et strict pensionnat.
 
Pourquoi je vous raconte toute cette histoire?
Parce que vous êtes aussi des parents d’ados ou des parents en puissance et que cela peut vous arriver! (Certes, on n’agresse plus les cabines téléphoniques de nos jours, mais les distributeurs de cartes iTunes sont des cibles potentielles…)
Parce que ce jeune homme a finalement terminé avec brio ses études en comptabilité et il a obtenu un titre professionnel reconnu. Il a pratiqué pendant 10 ans au sein d’un grand cabinet et il a servi de grandes entreprises à travers la province jusqu’au jour où il est tombé sur une entreprise qui a procédé à une vérification en profondeur de ses références incluant les statutaires (crédit, criminel, civil, etc.).
Parce que vous êtes recruteur et que ce genre de situations est plus commun qu’on ne peut l’imaginer.
 
Alors voilà, j’ai le rapport dans une main et l’offre du client dans l’autre (conditionnelle à la vérification des références**). Que faire? Jean, qui a désormais 35 ans, a enterré cette histoire dans sa mémoire depuis longtemps! Imaginez sa surprise quand je lui demande ce qu’il a contre les cabines de Bell Canada? Silence gêné, j’imagine sans peine la vision d’horreur qui refait surface immédiatement (en fait, j’hésite entre le visage de son père le jour de son arrestation, le policier qui l’a arrêté ou son été passé en travaux communautaires).
 
Je lui fais mon traditionnel laïus sur la transparence de la relation entre un candidat et son recruteur. On se dit tout pour éviter de mauvaises surprises et découvrir des squelettes dans les placards. Les recruteurs détestent ça. Le problème est que le Jean en question et ses parents avaient tellement voulu oublier ce terrible épisode qu’ils ont oublié de demander pardon!
 
Parce que, le pardon existe et il appartient à l’individu de le demander!
« Un pardon canadien entraîne le classement de votre casier judiciaire à part des autres dossiers judiciaires et de toute autre information liée à vos condamnations ainsi que le retrait de votre casier judiciaire du Centre d'information de la police canadienne (CIPC). Une fois votre pardon accordé par le gouvernement fédéral, votre casier judiciaire sera classé à part, et restera donc inaccessible sans l'autorisation du ministre de la Sécurité publique Canada. Vous ne serez, alors, sous aucune obligation de divulguer que vous avez obtenu un pardon. »
 
Mais encore faut-il le demander! Cela prend environ 5 ans pour pouvoir faire la demande après l’infraction et cela présente l’avantage de protéger l’individu par la Loi canadienne sur les droits de la personne qui « interdit toute discrimination envers les personnes qui ont obtenu un pardon, qu'il s'agisse de la prestation de services à ces personnes ou de leur accès à l'emploi. D'autre part, l'octroi d'un pardon vous permet de voyager en toute confiance aux États-Unis. ».
 
Pour plus de renseignements ou si vous voulez formuler une demande, visitez le site du gouvernement du Canada : http://www.pbc-clcc.gc.ca/prdons/pardon-fra.shtml.
Évidemment, Jean a fait sa demande en version express, il a été pardonné et recruté avec la bénédiction du DRH. C’est aujourd’hui un excellent CFO dont l’honnêteté est à toute épreuve. Finalement, cette affaire lui a servi de leçon deux fois : la première à 16 ans et la seconde à 35 ans.
 
Et vous, quels sont les squelettes qui pourraient faire réapparition sans crier gare?
 
**La Loi est stricte mais c’est une pratique courante et je reviendrai sur le sujet des références et de l’offre dans une prochaine chronique.
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